Barjac,

Ce soir mes mots vont être durs parce qu'en ce moment une fille que la vie a brisé il y a longtemps de ça et de la façon la plus ignominieuse qui soit va peut-être s'oter la vie sans que je ne puisse rien faire.

Je sais qui tu es, du moins je le pense, de phrases en phrases, de mots en mots et je ne te laisserais pas te flageller ainsi sans mot dire (sans maudire). Tu as le feu des mots, le feu de l'âme et j'en appelle ce soir à ta fierté, à ce qui dote un noble coeur d'une noblesse d'âme.

Nous nous sommes retrouvés sur des idéaux de vie, de valeurs chevaleresques et ce soir je te parle comme si je parlais à mon compagnon d'armes durement éprouvé par la perte de sa dame ... je te dirais rien d'autre que "lèves-toi mon frère, ce n'est pas de tes larmes que fleurira la terre, ce n'est pas une geste qui n'en est qu'à ses prémisces qui fera vibrer et chanter les coeurs de ceux qui en reprendront le refrain".

Relèves toi compagnon, prends tes armes et vas sur le front avec ta rage au ventre, le coeur noué mais l'âme enflammée comme le chevalier qui n'a de désir plus cher que de périr sabre au clair, dans une dernière charge ...

Prends sur toi tes maux, rentre tes pleurs, et serres les dents en harnachant ton destrier pour des lendemains qui attendent encore que ta noble lance décroche encore quelques étoiles à offrir à une humanité qui connait par trop la nuit.

Tu me disais un jour : "viens courrons ce monde et unissons nos verbes pour que les grands entendent la parole de ceux qui souffrent à leur ombre". Aujourd'hui c'est sur le même ton que je te dis de recouvrir ta fierté et te représenter front haut avec le verbe vibrant au-devant de tes armées pour les mener vers des horiZons moins sombres ...

Tu as bien des oeuvres à léguer à ce monde encore pour que tu ne te recroqueville sur toi-même harassé d'angoisses, frémissant d'anxiété. Affrontes-toi de face et assumes ton geste en attendant son verdict pour t'infliger la sanction ...

Il n'y a rien qu'il faille tuer ici Barjac sinon tes démons, tes seuls démons ... ce qu'elle pense tu ne dois le présumer ...

Ne t'afflige pas d'hypothèses avant de recevoir le coup des certitudes et d'en payer le coût conséquent ...

Redresses-toi compagnon, je t'attend à l'orée du bois, sèches tes larmes, affûtes tes armes et calmes ta monture, les troupes ont besoin de tes sourires pour les guider ...

Bien à toi ...

Songe