Février
J'ai reçu une offre pour un post-doctorat, avec mon ancien superviseur. Cela ne me tente qu'à moitié en soi, mais c'est une opportunité de carrière qui ne se refuse pas. J'ai envoyé ma candidature, on verra bien comment ça se passe. J'envoie un article scientifique pour publication et me prépare pour une conférence à Grenoble.

Mars
Trois jours à Grenoble. Ma chambre d'hôtel, meublée aux goûts de ma grand-mère protestante, a quelque chose de déprimant. A l'Hôtel des Alpes, le temps s'est arrêté quelque part au début des années 80. Pour couronner le tout, la seule lampe dans la chambre est celle du lit, seul endroit où justement on pourrait s'en passer. Pour pouvoir travailler sans risquer de me bousiller la vue, je dois déplacer la table à côté du lit, là où le néon éclaire un peu. Un peu de football à la télé, puis je vais prendre une douche. Quand je reviens, c'est pour découvrir que minuit vient de sonner, et que sur l'écran, des gens tous nus interprètent une version méconnue de la Danse du Marteau Piqueur. Imaginez un moteur à piston quand on oublie de passer la seconde. Si, comme certains l'affirment, le sexe est une forme d'expression, alors la pornographie n'a toujours pas dépassé le stade du morse. Tellement trop mécanique, criarde, sans laisser aucune place à l'imagination, à l'érotisme, au suave. J'eteins la tele.

Je dors mal, et la conférence m'ennuie un peu. Je m'échappe et vais me promener dans le centre ville. Grenoble n'est pas une belle ville. Hormis la grandeur des Alpes, qu'on aperçoit parfois au détour d'une avenue, il n'y a rien de particulièrement attrayant. Pas de fontaines, peu de statues, d'espace verts. La grisaille prédomine, des nuages bas jusqu'aux pierres des bâtiments. Attablé à un café, je regarde passer les gens. Le décor a beau être médiocre, cela n'ôte rien au charme des femmes. J'avais oublié comme les filles de mon pays sont jolies. Minces, grâcieuses, souriantes (pas toutes, mais je ne m'arrête pas à celles qui font la tête), elles sucrent de leur fraîcheur le café du voyageur.

Je mange mal. Je tente une crêperie ; pour un breton, c'est se sentir un peu moins isolé. Peine perdue. Les crêpes suintent l'huile, écoeurantes. Seul le cidre, servi à la traditionnelle bolée, vient me réchauffer le coeur. J'essaie un croque monsieur, immangeable. Je finis par trouver, au bout du deuxième jour, un petit restaurant sympathique où le potage est digne de la grand-mère, le steack frites (je ne prends plus de risque) tout à fait honnête, et le fromage blanc à la confiture un régal. Les choses simples restent les meilleures.

Au troisième jour, je présente mes travaux dans un amphithéâtre, devant une petite centaine de personnes. Puis file attraper un train pour Lyon, où mon avion de retour m'attend. Alors que je poireaute devant la gare, un gamin me demande une clope, que je lui donne, en lui demandant s'il est majeur. Il rougit jusqu'aux oreilles, je le laisse partir avec son précieux butin, je devrais avoir honte. Deux minutes plus tard débarquent deux types qui se prétendent de la police et ont apparemment dans l'idée que je viens de me faire livrer je ne sais quelle substance illégale. Je leur explique que je viens de filer une clope à un môme, voilà tout, et demande à voir leur carte de police. Je leur montre que je n'ai rien dans mes poches, et ils s'en vont, après m'avoir fait la leçon sur la distribution de cigarettes aux mineurs. Je réalise qu'ils ne m'ont pas montré leurs papiers ce qui me pousse à croire qu'il pourrait bien s'agir plutôt de dealers cherchant à limiter la concurrence. Au passage, s'il y a un avocat dans l'assistance : est-il illégal de donner une cigarette à un mineur ? Je suppose que oui bien que cela soit toléré. Dans le doute, la prochaine fois, je refuserai.

Hier, retour d'un week-end à Londres. Temps glacial, grêle, blizzard. Un café dans une épicerie portugaise, les escaliers dorés de Harrod's, les momies du British Museum. Je dois avouer avoir un faible pour les musées sur l'antiquité. Fascinantes civilisations que celles des grecques, des romains, des égyptiens, qu'on appréhende grâce à ces objets qui ont traversé les millénaires. Comme si l'on collait son œil à la lunette pour observer, à l'autre bout, ces populations éteintes au sommet de leur gloire. Les musées sont des bibliothèques, regorgeant de romans, pour quiconque a un peu d'imagination.

Side-project
J'ai démarré un blog de critiques de (mauvais) films. L'adresse est ici, si vous voulez y jeter un oeil. J'y publie sous un autre pseudo, mais vous n'aurez guère de peine à reconnaître vôtre hôte.

Sur ce, en route vers de nouvelles aventures, mon vieux Milou !