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L'amour inutile
Il est des moments où j’aimerais être frappé de quelque maladie entraînant une opération du coeur, de laquelle je sortirais débarassé de la capacité d’aimer une femme. Je n’aime pas l’amour ; c’est un sentiment malhonnête. L’amour est un parasite, comme le nain de Queneau dans son premier roman, dont j’ai oublié le titre (celui avec Narcense et Pierre — était-ce « Gueule de Pierre » ?). Vous avez le malheur d’ouvrir la porte, et le voilà qui vous bouscule, s’installe, prend ses aises, bouscule l’ordre établi. Le voilà maître au logis, tout lui est brusquement assujetti, il devient le roi Soleil autour duquel tout gravite désormais. On ne respire plus que pour lui, on n’attend plus que lui, on n’ose plus même vivre pour quoi que ce soit d’autre. J’essaie de comprendre l’intérêt de cette maladie vicieuse, parfois contagieuse, dont chaque être humain est infecté tôt ou tard. J’essaie de comprendre à quoi sert réellement cet imposteur, car lorsqu’on le prend dans son ensemble (et non dans ses petits détails qui nous font tous rêver), je ne vois rien qui le rende tellement attirant, au contraire, même.

Je ne m’attends pas à trouver une seule personne qui me dise que j’ai raison de rejeter l’amour parce qu’il fait de nous des êtres insensés. On me répètera encore mille fois que c’est justement ce qui fait sa beauté, son caractère incontrôlable, qu’on qualifiera de « sauvage » en collant derrière l’image un je ne sais quoi de délicieusement effrayant, comme des gamins jouant à se faire peur. On me dira, du rose plein les yeux, que j’ai tort, qu’il n’est rien de plus beau qu’aimer. On me vantera sur tous les tons de la gamme que l’amour est beau, qu’il nous affranchit ; les plus zélés iront jusqu’à affirmer qu’il est notre raison de vivre. On me parlera du coeur, sans cesse, avec passion, et il n’en sera pas un qui me parlera avec sa raison de ce qu’il pense être l’amour. Demandez au gens ce qu’ils pensent de l’amour, et ils vous répondent non pas en se basant sur l’amour tel qu’il est, qu’ils l’ont vécu, mais sur l’amour tel qu’ils le rêvent, tels qu’ils s’en souviennent une fois qu’ils n’ont gardé que ce qui en était agréable et l’ont sublimé. Les voilà au cinéma de leur propre vie, et ils rêvent à l’amour, cette chose fantastique que tout le monde cherche. Ils vous vantent ses mérites, sa douceur, sa perfection, mais ce n’est pas à l’amour qu’ils pensent, c’est à l’aimée, à la plage, aux palmiers qui poussent au bord du bungalow ou quelque mannequin bronze sa peau satinée, bref, à leur Hollywood. Et bien je vais essayer d’expliquer pourquoi l’amour me déplaît au point que je voudrais ne pas en être doué.

Bonheur, peine et joie
La vie, selon moi, est une quête du bonheur. Le bonheur, je le définis comme la quiétude, la sérénité, l’absence de tout souci qui agacerait notre esprit, la sensation paisible que notre vie repose bien assise sur un rocher inébranlable. Le bonheur, ce sont les quelques certitudes qu’il nous a fallu des années pour acquérir, c’est un chat qui dort dans un canapé, c’est la pluie qui tombe sur le toit la nuit, c’est un samedi matin quand on se dit qu’il y a encore dimanche derrière, c’est une crêpe à Montmartre en regardant les gamins faire du vélo, c’est un bateau revenu à quai, c’est le soleil dans les yeux au petit matin lorsqu’on a fait nuit blanche et qu’on a la tête et le coeur vide, qu’on n’est plus qu’une mare de lumière au milieu d’un monde dont on n’a plus qu’une conscience végétale.

Pour moi, le bonheur est tout opposé au coeur. Je m’explique. Considérons une échelle graduée dans les deux sens, positif et négatif, par rapport au zéro. Au-dessous, c’est la souffrance, la peine, le tourment, et notre âme y est en pleine tempête. Au-dessus, c’est la joie, le plaisir, l’excitation, l’impatience avant quelque événement important, le grand huit de la fête foraine, bref, ce à quoi ressemblerait la mer si le ciel était dégagé en pleine tempête. Car, les émotions positives du coeur sont aussi des tempêtes ; on ne saura prétendre que notre âme y est au calme. On ne dort pas plus lorsqu’on doit retrouver le lendemain l’aimée qui nous a tant manqué que lorsque celle-ci nous a souhaité bon vent. La joie comme la peine sont des état de désordre. Le bonheur c’est la paix de l’âme, ce n’est donc pas, confusion fréquente, la joie. C’est le zéro sur l’échelle. Ni peine, ni joie.

Le bonheur, c’est un état de plénitude, c’est l’état où rien ne manque, l’état où on ne tend vers rien, le contraire de l’impatience. Hors la peine comme la joie impliquent l’impatience. La peine, on le conçoit facilement, car elle est se situe en deça du bonheur, et par conséquent, nous rend impatient d’aller mieux, d’être heureux à nouveau. La joie, à l’inverse de la peine, est au delà du bonheur ; on est allé trop loin dans la direction du bonheur, on croit avoir trouvé mieux, pensez si on ferait machine arrière ! Mais la joie entraîne l’impatience. Nous l’assimilons au bonheur, à tort, et ce faisant, nous déplaçons le zéro, au point qu’ensuite, toute une partie de ce qui était agréable, est passé dans le négatif, devenu une peine légère, un ennui. J’avais l’habitude, en Angleterre, de sortir fumer avant de me coucher. Là, dans le couloir extérieur, au premier étage, j’observai les lampadaires, l’horloge de la fac, la rue déserte. C’était un petit bonheur simple, paisible. Mais lorsque je revenais de soirées où j’avais éprouvé de la joie, où j’avais dansé, chanté, ri avec mes amis, et que je me retrouvais à nouveau seul sur mon balcon, ma dernière cigarette avait un goût amer, la rue déserte m’ennuyait, l’immense horloge marquait un temps qiu me semblait gâché, tout m’ennuyait. Ce qui était heureux, au contrecoup de la joie, était devenu légèrement triste. La joie crée une impatience après coup, laisse un vide, un manque, et l’impatience, le fait de tendre vers autre chose que notre état présent, s’oppose au bonheur qui lui goûte pleinement le présent.

Si le bonheur est l’eau, la joie est un soda, coloré, pétillant, au goût sucré. Un enfant qui a bu du soda boude l’eau car ce n’est pas « l’eau » qu’il voit, mais « l’absence de soda ». Le gamin veut du soda, encore, de la couleur, des bulles, des arômes intenses. Seulement, grimpez quelques heures sous le soleil dans les montagnes, et parvenu au sommet, à demi mort de soif, vous verrez bien à quelle boisson vous penserez immédiatement. C’est une expérience que j’ai faite, et les marcheurs me donneront raison. On vous proposerait différentes boissons, vous choisiriez l’eau. Avec le soda, on s’étouffe, il est soudain trop piquant, on ne peut le boire aussi vite que le corps le demande ; il est aussi trop sucré, il trompe la soif, mais ne l’appaise pas. Dans le besoin, lorsque nos fantaisies se taisent pour laisser parler le corps, c’est l’eau pure qu’il appelle. De même, mon âme appelle le bonheur, et non la joie. Je ne suis pas joyeux lorsque je regarde au matin la ville s’activer au pied de ma colline, mon coeur est silencieux et ne fait qu’assurer ses fonctions vitales, mais je suis heureux de ce soleil qui éclabousse les toits, de ces flots humains qui coulent doucement dans les rues, de cette vie qui jaillit comme... d’une source.

Amour et bonheur
Aussi, je prétends que l’amour ne peut être concilé avec le bonheur. Je dirais même que c’est son pire ennemi, car qu’est-ce qui, mieux que l’amour, met le coeur en désordre ? L’amour est, de toutes les manifestations émotives, la plus opposée à la paix du coeur : d’une part, elle l’emmène aussi bien dans la joie que dans la peine, et d’autre part elle le pousse au maximum sur l’échelle graduée. Je ne conçois rien de plus excitant pour le coeur (excitant au sens physique du terme, comme lorsqu’un électron est excité, par exemple) que l’amour. L’amour, ce sont les deux extremums (positif et négatif) ; le bonheur, c’est le zéro. Pourra-t-on faire coïncider les extremums et le zéro ? Mathématiquement, cela supposerait que le minimum est égal au maximum qui est lui même égal à zéro. Cela reviendrait à avoir un coeur qui ne connaît aucune joie ni aucune peine. C’est à dire un coeur d’homme heureux (ou mort, mais cette possibilité n’est guère intéressante). Ainsi, d’après une démonstration mathématique élémentaire, faire coïncider l’amour et le bonheur, c’est arriver au bonheur.... et à un amour nul (ni joie, ni peine, peut-on encore parler d’amour ?).

On peut opposer deux choses à mon raisonnement. D’une part, je ne me suis pas assuré qu’il y avait véritablement équivalence entre mon image de la règle mathématique et celle des émotions du coeur. Ma démonstration, juste dans ce domaine, ne l’est dans l’autre qu’à condition qu’il y ait bien équivalence. Je la considère comme telle jusqu’à ce qu’on me démontre le contraire. D’autre part, et plus gênant pour ma démonstration, ce que j’entends par amour. Il est clair que ce que j’appelle amour est l’amour tel que je le conçois moi, et par la description que j’en ai donné, on aura plutôt envie de l’appeler « passion » qu’amour. La passion, me faudrait-il corriger, est l’opposé du bonheur. Cela ne change pas grand-chose à mon histoire étant donné que, pour l’homme que je suis aujourd’hui, amour ou passion sont identiques (disons pour être plus précis que l’amour démarre par la passion ; il évolue ensuite). Mais cela n’empêche pas de considérer un amour dépourvu de son côte passionnel, et je vais même me faire mon propre opposant : j’ai connu de tels moments où, bien qu’on aime, la passion cesse. On cesse de craindre, d’attendre, d’espèrer ; on profite de l’instant, assis sur la jetée d’un port, en écoutant le clapotis des vagues, en regardant l’horizon, et on est bien, calme, paisible. C’est dans ses moments que les filles mettent la tête sur l’épaule des garçons. Et on n’a pas envie de s’embrasser ; on le fera plus tard, pour l’instant, on profite de l’accalmie. Oui, le bonheur peut exister en amour, mais il faut du temps, car comme je l’ai dit, le bonheur est fait de certitudes, et les certitutes en amour sont encore plus longues à acquérir qu’ailleurs. Mais oui, il me faut mettre cette limite à mon affirmation : la passion s’oppose au bonheur, mais elle n’est que la première partie de celui-ci.

Je résume où nous sommes arrivés. L’objectif principal de l’homme est la quête du bonheur (hypothèse de départ, que je suppose vraie). La passion s’oppose au bonheur. Par conséquent, notre quête du bonheur devrait nous éloigner de toute passion.

J’ai affirmé que le bonheur était bâti sur des certitudes. C’est une hypothèse tirée de l’intuition, et je serais bien en peine, pour l’instant, s’il me fallait le prouver par une démonstration rigoureuse. Mais, admettons que cela soit le cas. Que serait, alors, un homme heureux ? Ce serait un homme certain. Il convient de distinguer l’homme qui croit avoir raison, et celui qui sait qu’il a raison. Le premier est un homme de préjugés, et les vérités qu’il abrite ont besoin d’être défendues ; le second est un homme de savoir, et c’est lui qui s’appuie sur elles, non l’inverse. Le premier est un homme qui admet, le second est un homme qui démontre. Le premier est un homme qui loue sa maison, le second un homme qui l’a bâtie. Le premier connaît un résultat, parce qu’il l’a lu, parce qu’un autre homme comme lui lui a refilé le tuyau, voire simplement parce qu’il se fie à son estimation ; le second accorde peu d’importance au résultat, il connaît la démonstration qui y mène, et c’est cela que j’appelle « certitude ». Petit à petit, on parvient à démontrer d’autres certitudes à partir des certitudes de base, celles qui sont indépendamment de tout (du moins supposées telles), et qu’on appelle « axiomes » en maths. Puis, sur ces certitudes, on en bâtit d’autres. Mais si les résultats sont les pierres, la démonstration en est le ciment sans lequel l’édifice s’écroule au moindre coup de vent. Je pense que plus on possède de certitudes, plus on s’approche du « bonheur total », j’entends simplement par là le bonheur qui durerait infiniment. Je doute qu’un tel bonheur soit accessible à l’homme. Mais on peut tendre vers lui, et chaque pierre posée assoit un peu mieux notre individu, confère un peu plus de solidité à l’édifice.

J’en reviens à l’amour. Je l’ai appelé « saloperie », avec un ton évident de provocation, mais indépendamment des formes que j’y mets, le fond de ma pensée est là. Puisqu’il démarre par la passion (du moins dans mon cas), qui est l’ennemie du bonheur, quel intérêt aurai-je à aimer ? La recherche d’un « bonheur en amour », comme j’évoquais plus haut ? Mais un tel bonheur dépend-il de l’amour ? Ne puis-je éprouver le bonheur sans l’amour, seul sur la jetée, face à la mer ? Est-ce que la joue collée à la mienne ajoute quelque chose à mon bonheur ? Elle peut ajouter une certitude à ma collection : celle d’avoir quelqu’un sur qui m’appuyer. En suis-je certain ? D’abord, une telle certitude ne peut être démontrée, parce qu’elle contient une part d’indéterminisme. L’être aimé n’est pas déterministe (le déterminisme étant ce qui fait qu’une cause entraîne un effet, et qui est le moteur des démonstrations que j’évoque). Il agit selon une volonté qui lui est propre, et qui m’échappe. Aussi, ce n’est pas une véritable certitude que j’ai quand je pense être aimé. C’est une intuition, une hypothèse basée sur la confiance, une croyance, et qui peut tout à fait être invalidée demain. Je suppose, mais je ne peux pas le prouver, que parce qu’une femme m’aime aujourd’hui, elle m’aimera demain. On voit comme cela est fragile, et qu’on ne peut en conséquence l’appeler « certitude », même si cela procure sur le moment les mêmes sensations.

Et c’est là une des raisons majeures pour lesquelles j’en ai après l’amour. L’amour parvient à nous faire croire certaines choses qui n’ont aucun fondement. Dans toutes les situations de notre vie, nous utilisons notre raison pour réfléchir, décortiquer des problèmes, être capable soit de les résoudre, et si le résultat ne peut être positif, de nous en écarter. Pour quelle raison ne sommes-nous pas capables d’appliquer de la même manière notre raison à l’amour ? Voilà une chose qui m’échappe, et qui me rend méfiant. Que penser d’une chose qui est pour la raison comme un poisson, lisse, gluant, insaisissable ? On dit que l’amour rend aveugle, et c’est une image on ne peut plus juste. L’amour est une chose qui vient débrancher l’organe de la prudence, la raison, et nous plonge dans une état où on ne réfléchit plus, on n’écoute plus que notre coeur, comme si le coeur pouvait nous guider où que ce soit. Le coeur est un moteur, il nous donne l’énergie pour avancer. Mais c’est la raison qui dirige. Aimer, c’est pousser le moteur à son maximum et lâcher le volant. Certes, la chose est grisante sur le moment. Il en est qui finissent par tomber dans un fossé et s’en tirent avec quelques blessures plus ou moins graves. La majorité des personnes appartiennent à ceux-là. Il en est qui heurtent un mur de plein fouet, et qui n’auront plus jamais l’occasion de lâcher le volant. Ils sont rares, mais ils existent. Il en est enfin qui ont de la chance, trouvent une route suffisamment droite et longue pour que la mort les emmène avant de rencontrer une des deux situations précédentes. Ceux-là sont plus rare encore que les précédents.

Je crois que beaucoup de gens, après s’être pris des gadins, décident de ne plus pousser le moteur à fond, et de ne lâcher le volant que d’une main. Je crois que la majorité des gens sont ainsi, qu’ils finissent par se marier par peur de vieillir seul, et que ceux qui se marient véritablement d’amour, d’amour immense et plein, sont aussi rares que les pépites d’or dans les rivières. Moi, je fonce toujours dans les fossés, et je n’ai pas l’intention de faire semblant. Mais je me pose la question : pourquoi l’amour est-il ainsi ? Pourquoi l’amour ne peut-il être raisonnable, pourquoi doit-il échapper à la raison ? Pourquoi ne peut-on aimer autrement qu’aveuglement ? Pourquoi sitôt qu’on aime doit-on passer des larmes de joie aux larmes de douleur et vice-versa ? Pourquoi l’amour n’est-il pas comme le reste, un domaine dans lequel on avance prudemment, en s’aidant d’une réflexion qui nous aide à aimer mieux, à aller loin ?

Oui, je crois que ce qui me dérange dans l’amour, ce qui fait que je le fuis, c’est qu’il échappe à ma raison. Et s’il échappe à ma raison, c’est parce qu’il fait intervenir des choses que l’exercice de pensée le plus soutenu ne pourra jamais saisir : la volonté d’autrui, qui pour tout autre que lui est un mystère impénétrable. Quiconque s’est déjà trouvé aimant, mais non aimé, regardant couler entre ses mains un amour inutile, s’est exclamé « quel gâchis, si seulement il/elle m’avait aimé(e)... » comprendra peut-être ce qui me dérange. Ce n’est pas de « contrôler » l’être aimé, je ne voudrais sûrement pas en faire un prisonnier, c’est de ne pas être capable de le prévoir, et donc de prévoir comment notre amour évoluera. On me dira que si, on peut prédire les choses, qu’on peut déceler des indices, etc. Je n’y crois pas. Il y a des gens qui vous disent « je t’aime » un soir et le disent à d’autres le lendemain. Moi-même, je me suis fiancé à une personne que j’aimais plus que tout, et j’étais réellement persuadé que cela durerait jusqu’au bout. Et puis blam, un jour tout s’est éteint en moi, et je serais bien incapable d’expliquer le pourquoi de la chose, comme j’ai été incapable de la voir arriver. En amour, les choses deviennent imprédictibles. Hors, l’imprédictible, quand il y a tant de souffrance à la clé et si peu de bonheur, cela me rebute.

Bien sûr, chaque fois que je croise quelque jolie minette, mon coeur s’emballe, et je sais que je continuerai courir après toute fille qui me plaira. Mais je le ferai uniquement parce que mon coeur, sitôt qu’il se met à vibrer, occulte totalement ma raison qui, elle, ne manquerait pas de m’éloigner du tourbillon. J’aimerais pouvoir m’en prendre aux femmes, comme font certains, et dresser une liste de griefs que je pourrais leur adresser, mais je sais qu’il en est des femmes comme des hommes : il en est de bonnes et de mauvaises. Et puis, lorsqu’une fille ne veut pas m’aimer, cela n’est pas sa faute. Qui sait si elle aussi elle ne court pas après quelqu’un qui ne la voit pas ? Qui sait si moi aussi quelqu’un ne me court pas après que je ne vois pas ? Ce n’est pas là une question de justice. L’amour n’a rien à voir avec la justice. Dire « elle ne m’aime pas, c’est injuste, avec tout cet amour que j’ai pour elle », c’est faire de ses désirs l’étalon de la justice, chose à la fois égoïste mais surtout dangereuse. C’est là encore, une preuve que l’amour brouille jusqu’à notre perception du juste et de l’injuste, et cela encore me pousse à m’en méfier. Parce qu’on croit que ce que notre veut est toujours juste, on voit l’injustice là où elle nous arrange. Le coeur n’est pas juste. La raison, lorsqu’elle ne sert pas quelque désir du coeur, l’est bien plus, à mon avis. Car elle est neutre, un simple exercice de mathématiques, nous menant d’un état A à un état B en appliquant des règles où aucun sentiment n’intervient. Le coeur... non, le coeur est l’organe du désir, de la frustration s’il n’est pas réalisé, il est intéressé, c’est un organe qui brûle, consume, dévore. Je ne lui fais pas confiance, ni à lui, ni à l’amour qui en est l’utilisation à plein régime.

Je concluerai provisoirement cette discussion (car il reste beaucoup à ajouter) en affirmant qu’à mon avis, celui qui cherche l’amour s’éloigne du bonheur. Mais qu’il est sain malgré tout de chercher l’amour si celui-ci, par les désirs qu’il apaise, nous permet d’approcher un peu plus de la tranquillité de l’âme. Quant à moi, je crois que je trouverais le bonheur loin des femmes, quelque part où ma raison qui les rejette en sera débarassé, et où mon coeur que leur seule vue rend fou n’aura plus l’occasion de me tourmenter. Prochain chapitre, « la solitude comme source du bonheur ». ;)

Ecrit par Barjac, le Vendredi 16 Janvier 2004, 19:35.
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Commentaires
Le 16/01/04 à 20:40
Pour commencer, je trouve cet exposé réellement intéressant (et surtout tellement différent de ce qu'on peut lire par ici). Pas facile de commenter ce genre de propos et de maintenir le niveau quand on a autre chose à faire de sa soirée, cela dit.

Deux ou trois petites choses : le paragraphe sur les certitudes.
(qui finit par "Je crois, sans" et je suppose que c'est une erreur)
Ce paragraphe commence par "J’ai affirmé que le bonheur était bâti sur des certitudes". Grâce à cet axiome, est démontré précédemment que le bonheur n'était pas compatible avec l'amour, profondément incertain. Je suppose donc que cette affirmation est elle-même une certitude, pour nous permettre justement de conclure ce qu'on en conclut. C'est le principe d'une démonstration, d'ailleurs rappelé : " Petit à petit, on parvient à démontrer d’autres certitudes à partir des certitudes de base, celles qui sont indépendamment de tout (du moins supposées telles), et qu’on appelle « axiomes » en maths.".
Seulement il y a un hic, c'est que ce qui devrait être un axiome pour que la démonstration se tienne, est justement "une hypothèse tirée de l’intuition, et [l'auteur] serait bien en peine, pour l’instant, s’il [lui] fallait le prouver par une démonstration rigoureuse"

Mon opinion dans cette affaire n'est pas vraiment claire, ce qui est certain c'est que ce n'est qu'une opinion, un résultat proche de l'aléatoire, étant donné la somme d'informations et d'expérience diverses qu'a dû traité mon réseau neuronal avant de former ses paroles :
1. Je pense qu'il n'existe pas de certitude humaine. Qu'en conséquence toute démonstration mathématique en ce qui concerne la psychologie humaine relève d'un excès de cartésianisme.

2. Je pense que "l'homme certain" dont on parle ici n'est certainement pas un homme malheureux. J'ai un mal fou à penser le bonheur positivement, autrement que pas "l'absence de malheur". C'est un peu cette définition qui est prise aussi dans le texte. Mais je ne pense pas que la vie en général soit une quête de ce bonheur-là. Je pense que la vie et les aspirations des hommes sont beaucoup plus complexes que ça. Nous ne sommes pas tous des moines tibétains. (hélas ?) Laissons la liberté aux hommes d'avoir des buts douloureux, c'est peu recommandable mais c'est humain, justement.

3. Malgré mes réserves sur la façon dont ceci est démontré, je suis complètement d'accord pour faire descendre l'amour de son piédestal romantique qui fait tant de mal, ne serait-ce qu'en alimentant des illusions. On sait comment fini le jeune Werther (euh, si je me souviens bien il se suicide, ou serait-ce ma propre vision pathologique de la chose ? Si ce n'est pas vrai c'est en tout cas vraisemblable). Et si je ne peux pas dire ce qu'est le bonheur, ni ce qu'est le sens de la vie, je crois que le but de la vie ce n'est pas d'être mort. Le but de la vie serait justement de se maintenir en vie, simplement, biologiquement.

J'aime bien la vision lucide et imagée de cette réflexion, j'aime bien la méthaphore joie/soda bonheur/eau. Et maintenant il faut vraiment que je fasse autre chose de ma soirée. Surtout que la lucidité, en général, se combat par l'alcool ou par la drogue, justement parce que la lucidité fait souvent du mal avant de pouvoir, hypothétiquement, faire du bien.
Répondre à ce commentaire
Le 21/01/04 à 19:57
Chère Cloreen,

Je te remercie pour ton intervention, et repondrai point par point à l’avis que tu proposes.

1. La question de savoir s’il existe ou non de certitudes humaines, c’est-à-dire si j’ai bien compris de certitudes dans le domaine de la psychologie, est une question intéressante. Si l’on parvient à démontrer que les mécanismes du comportement échappent à tout déterminisme, autrement dit qu’ils sont aléatoires, alors ma démonstration (et beaucoup d’autres) seraient invalidées. Les progrès de la psychanalyse a tenté de démontrer que tout était le résultat d’une cause préalable, souvent d’origine inconsciente. La psychanalyse a peut-être parfois poussé à l’excès son désir d’un homme totalement déterministe, mais quiconque a lu Freud sans parti pris, avec la simple volonté de comprendre ses théories, aura été troublé des résultats qu’elle avance avec une méthode relativement rigoureuse. Certes, il y a dans ce qu’avance le père de la psychanalyse des « raccourcis », des zones d’ombres, qui mériteraient d’être mieux étayées, mais l’ensemble contient aussi des choses qui se vérifient dans l’expérience, et ne peuvent être rejetée en bloc. Puisque sa thèse suppose bien souvent un travail d’interprétation, on peut lui reprocher de parfois s’arranger pour interpréter tel ou tel rêve ou lapsus d’une manière qui l’arrange. Mais il faut distinguer les différentes étapes de l’établissement d’une théorie. La première est l’observation, la seconde la construction de la théorie elle-même et la troisième, sa validation. En physique, la validation ne dépend que de la précision des instruments de mesure. En psychanalyse, elle demande une phase d’interprétation qui elle fait intervenir un facteur subjectif, l’interpréteur, qui peut tout à fait se débrouiller pour interpréter d’une manière qui arrange la théorie. On est obligé de s’en remettre à la bonne foi de cet interpréteur, ce qui est gênant pour quiconque est habitué à l’objectivité de la physique ou des maths.

Avec Freud, il est intéressant de constater qu’il ne nous cite (du moins dans ce que j’ai pu lire de lui) aucun cas face auquel il se soit trouvé bloqué. Il parvient toujours à trouver un chemin qui le satisfasse, quitte à ajoute à sa théorie un ou deux amendements. C’est une question que je me pose encore, même si je ne doute plus que théorie soit juste dans les grandes lignes : a-t-il inventé une théorie qui se plie à l’expérience, ou a-t-il fait plier l’expérience à la théorie ? L’exploration du mental humain étant encore neuve, il est sans doute normal qu’on y patauge un peu, et il est certain qu’il y reste énormément à découvrir. Le corps humain a longtemps été considéré comme quelque chose de magique, d’inexplicable, et le domaine de la médecine revenait aux prêtres, sorciers, hommes qui traitaient aussi la religion. Le corps était inexplicable, seuls les dieux, et leurs délégués pouvaient le soigner. Aujourd’hui, grâce au progrès et au travail de milliers d’hommes à travers le temps, on sait soigner la majorité des maladies qui tuaient mystérieusement l’homme d’il y a mille ans. On sait pourquoi telle plante soigne telle aigreur : c’est telle molécule contenue dans la plante qui neutralise telle autre molécule responsable de la douleur. Ce qui était magique hier ne l’est plus aujourd’hui parce qu’on a su l’observer, l’expliquer.

Tu penses sans doute le mental comme nos ancêtres pensaient le corps : une chose tellement compliquée qu’elle en devient aléatoire. Cela amène d’ailleurs une autre question : le hasard existe-t-il vraiment ? Car, dans bien des situations, on appelle « aléatoire » ce qu’il faudrait en réalité appeler « trop complexe pour être compris ». Le caractère aléatoire d’un phénomène vient alors non pas de ce que les objets échappent aux lois de la physique, mais à ce que ces lois atteignent une telle complexité qu’elles deviennent impossibles à calculer avec les moyens actuels. Dés lors, ce type de hasard est simplement un déterminisme qui dépasse les moyens techniques que l’on peut y appliquer, et que par conséquent, on considère comme aléatoire. Pratiquement, cela revient au même : un phénomène qui, tel qu’on le conçoit, échappe aux lois de la science. Mais, je tiens à distinguer un phénomène dont le caractère aléatoire vient de ce qu’on ne peut l’appréhender entièrement (exemple : les interférences ou « bruits » qui interviennent lors d’une transmission, et qu’on considère aléatoires parce qu’elles résultent d’une quantité astronomique de facteurs, depuis l’usage des cables jusqu’aux ondes émises par les corps alentour en passant par l’erreur qui existe déja dans le signal de départ, qu’on ne peut générer qu’imparfait avec nos outils), et un phénomène dont le caractère aléatoire persiste alors qu’on est tout à fait capable de l’analyser entièrement. Dans le premier cas, je dirais que le tirage des boules de loto est déterministe, et qu’il pourrait tout à fait être prédit si l’on était capables de mesurer toutes les données d’un tel problème (interactions entre les boules, frottements de la paroi, de l’air, etc.). Seulement, dans l’état des moyens actuels, cela nécessiterait un travail colossal, et je ne suis même pas certain qu’on ait des outils suffisants pour mesurer tout ce qu’il serait nécessaire de mesurer. Mais je pense qu’un tel problème est soluble, car il ne fait intervenir que des phénomènes physiques. Je n’ai pas d’exemple de phénomène purement aléatoire, par contre, qui ne puisse être ramené au cas précédent. Mais je pense qu’il en existe.

Tu me rétorqueras qu’il y a des limites que la science ne pourra jamais dépasser, par exemple dans la précision des mesures. C’est possible, ou tout du moins, disons qu’au fur et à mesure que la science avance, en améliorant son « champ de vision », elle découvre qu’il y a toujours plus petit à découvrir. On pensait avoir atteint l’infiniment petit avec l’atome, il me semble qu’on l’a dépassé avec les quarks (ce sont là de vagues réminiscences, je n’en mettrais donc pas ma main au feu).

L’esprit humain est-il aléatoire ? C’était plus ou moins la question de départ. Et bien, je reviendrai sur le paragraphe concernant les débuts de la médecine. Aujourd’hui, on considère l’esprit inexplicable comme autrefois on considérait le corps inexplicable. Certes, l’esprit est bien plus difficile à observer que le corps car, à la différence de celui-ci, on ne peut en faire qu’une observation indirecte. On ne connaît de l’esprit que ses conséquences : les comportements qu’il engendre, les rêves qu’il produit. Il y a sans doute une question d’éthique qui pousse les gens à vouloir l’esprit inexplicable : être capable de l’expliquer, cela ne signifierait-il pas être capable de « lire dans les pensées » ? Si la psychanalyse a rencontré beaucoup d’opposants, c’était parce qu’elle semblait donner accès à des coins de la personnalité que personne ne souhaite voir dévoilés (voire dont nous-mêmes ne sommes pas conscients). Ce qui a rassuré, sans doute, c’est le fait que même le psychanalyste ne peut lire en nous sans notre consentement. C’est avant tout le malade qui se donne. S’il ne le veut pas, nul ne peut l’y forcer. Si je n’ai nulle crainte à considérer l’esprit comme compréhensible, c’est parce que je ne vois pas là une atteinte à ma liberté. Il est une chose qu’on ne pourra pas expliquer, parce qu’à mon avis elle n’a que des conséquences, et aucune cause, c’est la volonté. La pensée découle de la volonté (je pense ce que je veux), et même si l’on parvient un jour à lire cette pensée (ce dont je doute, et ne souhaite certainement pas), on ne pourra pas pour autant la contrôler. Je ne m’étends pas plus sur la question, j’ai déjà largement dévié du sujet initial !

Tout cela pour dire que je ne crois pas, personnellement, à un esprit qui soit un autre monde totalement mystérieux et inexplicable. Je pense, certes, que l’esprit est une chose fort complexe, et je pense que tu as raison de souligner qu’il y a de limites au déterminisme. Mais si tu me reproches d’être trop cartésien, j’aurais pour ma part tendance à te reprocher de ne pas l’être assez. Bien souvent, on « admet » que l’esprit est un à part, on le conçoit comme une chose qui échappe à toute règle précise. Mais c’est souvent un a priori, rarement le résultat d’une réflexion menée avec rigueur, par laquelle on a démontré qu’aucune règle ne saurait décrire le mécanisme de l’esprit. Les démonstrations que j’ai faites sont, comme j’ai dû le préciser, des exercices dans le domaine abstrait de la théorie. Il n’est pas dit que la théorie colle au réel. Toutefois, j’ai effectué ma démonstration avec bonne foi, selon ce que je ressens et estime. Il est clair qu’elle est toute subjective, et que la vision des choses que je propose n’est nullement une règle générale.

2. « L’homme certain » n’est, effectivement, pas un homme malheureux, dans ma conception de la chose. Le bonheur est fort souvent défini comme « l’absence de malheur », tu as raison de le rappeler. C’est un peu la définition que j’utilise, même si j’ai essayé de la nuancer, car je peux concevoir un bonheur qui ne soit pas une absence, mais bien une présence. Présence de la plénitude, présence de la sérénité. Ensuite, si on définit la sérénité par l’absence de trouble et la plénitude par l’absence de manque, cela revient au même. Mais, tu concevras qu’il existe un bonheur, et que lorsqu’on est heureux, on affirme « je suis heureux » et non « je ne suis pas malheureux », ce qui selon moi montre qu’on ressent le bonheur comme une chose qui se définit à elle seule, et non le pendant d’autre chose. Si le bonheur et le malheur s’excluent mutuellement (mais par exemple, je ne dirais pas que le bonheur et la tristesse s’excluent mutuellement ; je pense qu’il peut exister un bonheur dans la tristesse, aussi surprenante que soit une telle affirmation), cela n’implique pas qu’ils se définissent l’un par l’autre (enfin son absence). De même que je peux définir le froid et le chaud, je ne définis pas le chaud par l’absence de froid, ni réciproquement le froid par l’absence de chaud. Le froid et le chaud stimulent différemment mon sens du toucher, et s’il n’y avait pas de froid, le chaud existerait quand même. Il serait ce que je sens lorsque je touche une surface de température supérieure à celle de mon corps. De même, ce n’est pas parce que je ne suis pas malheureux que je suis heureux. Il y a des jours où je marche dans la rue d’un pas lent, je m’ennuie, je suis malheureux. Il y a des jours où je marche dans la rue d’un pas léger, je sifflote, je suis heureux. Et puis il y a des jours où je marche dans la rue pour aller d’un point à un autre, et cela ne m’est ni agréable, ni désagréable. De même que la routine, ce qu’on fait sans y penser n’est ni malheureux, ni heureux. Je ne suis pas heureux de prendre une douche le matin. Je ne suis pas non plus malheureux. Je le fais sans y penser, à vrai dire. Mais il est vrai que le bonheur est aux antipodes du malheur, aussi on tend à le penser comme son contraire. Il est peut-être son contraire, d’ailleurs. Cela n’empêche pas qu’il n’est pas sa seule alternative (la neutralité en est une). Aussi, je pense qu’on peut définir le bonheur autrement que comme « l’absence de malheur », non de manière négative, mais bien positive. Il serait intéressant d’essayer d’en proposer une définition précise.

Je ne sais pas si la vie « en général » est la quête de ce bonheur-là. Mais je pense que ma vie, en tout cas, pourrait tout à fait y être consacrée. J’ai beaucoup d’estime pour les moines tibétains (et les moines en général, d’ailleurs, bien que je ne sois versé dans aucune religion). Je trouve que c’est un type d’homme qui cherche à s’affranchir de tout désir, en s’éloignant d’une part des femmes, d’autre part du confort matériel. Je pense que je pourrais me faire moine, s’il était un ordre dépourvu de réligion, ne serait-ce mon besoin d’indépendance qui me rendrait difficile la vie en communauté !

3. J’ignore ce qui arrive à ce pauvre Werther ; il me fallut chercher qui il était, et hormis le nom de l’auteur (Goethe, c’est ça ?), je ne sais rien de lui, pas même le nom de l’oeuvre... Pense à combler mes lacunes ! Quoiqu’il en soit, non, je ne pense pas non plus que le but de la vie soit d’être mort (formule qui ne manque pas de faire sourire). Que cela le restreigne à se maintenir simplement en vie est tout de même restrictif. Se maintenir en vie, c’est bon pour une plante, à la limite un animal. Je maintiens mon avis que l’homme cherche le bonheur, au sens où je l’ai défini, c’est-à-dire grosso modo qu’il cherche la sagesse. C’est du moins ce que je compte faire de la mienne, de vie. Essayer de comprendre la maximum de ce qui m’entoure, de comprendre l’homme, de comprendre le monde, et peut-être de laisser un peu de ce que j’ai cru comprendre aux suivants par le biais de l’écriture. Je crois que la vie est un endroit où l’on est pour apprendre, par l’expérience, par la réflexion, et mettre en oeuvre ce qu’on a appris. Apprendre sur le tas, si l’on veut. 80 ans pour apprendre à vivre, et une fois qu’on aura compris comment vivre, il nous faudra mourir... Quel gâchis ! ;)

« J’aime bien la vision lucide et imagée de cette réflexion », « la lucidité en général se combat par l’alcool ou par la drogue ». Dois-je comprendre que tu assimiles ma réflexion au résultat de l’excès de boisson et à l’usage de stupéfiants ? :) Cette vision de la lucidité que tu exposes est curieuse, et ce n’est pas la première fois que je l’entends. Elle semble dire que le monde est un endroit affreux, dont nous avons une perception complètement édulcorée, et que la lucidité est la suppression de ce filtre coloré, pour ne laisser que le monde tel qu’il est. Ce n’est pas la conception que j’ai de la lucidité. La lucidité n’est pas le contraire de l’optimisme ! Etre lucide, c’est mesurer ce qu’il y a de mauvais dans notre monde, mais c’est aussi réaliser ce qu’il y a de bon. Etre lucide, c’est voir le monde tel qu’il est, et je pense que le monde n’est ni tout rose, ni tout gris. Il y a beaucoup des deux. Ceux qui fuient le monde dans l’alcool et la drogue sont ceux qui en ont une vision incorrecte, trop grise. Je ne dis pas qu’il ne m’est jamais arrivé de boire pour fuir. Je l’ai fait quelques fois, pour fuir l’ennui, pour fuir la peine, pour fuir aussi parfois certaines inhibitions. Ce sont des chemins qu’il faut emprunter, ne serait-ce que pour ne pas y remettre les pieds lorsqu’on les recroise. Mais il y a toujours un lendemain à une cuite, qui suffit à démontrer que l’alcool ne résout rien. Alors on cherche autre chose, de plus solide, de plus durable, à travers la réflexion qui elle a le mérite de ne pas s’évanouir au petit matin. Qui plus est, la lucidité n’est pas une affaire de chaque heure de chaque jour. On a des instants de lucidité, mais heureusement on n’a pas que ceux là ! Il est intéressant de réfléchir, mais il est bon aussi, comme tu le dis, de « faire autre chose de sa soirée ».

Par ailleurs, tu as bien fait de me signaler l’erreur, que j’ai corrigée.

Sur ce, je te remercie pour ta participation, n’hésite surtout pas à réagir à nouveau si le coeur t’en dit.

Bien à toi,

Barjac
Répondre à ce commentaire
Le 20/01/04 à 12:58

Barjac,

Je vais commencer cette réponse par un petit coup de gueule dont, j'en suis certaine, tu ne m'en voudras pas...

Je ne comprends pas comment tu peux parler de l'amour avec tellement de froideur... Comme si pour toi, l'amour n'était rien d'autre qu'un mot. Mais sans amour, on mourrait...

As-tu déjà imaginé ta vie sans la moindre étincelle d'amour? Pourrais-tu vivre sans aimer? Et je ne te parles pas forcément ici de l'amour partagé avec une femme, mais de l'amour, dans sa forme générale. L'amour d'une mère pour son enfant, l'amour qu'on peut lire dans le sourire d'un inconne, au coin d'une rue, l'amour dans le regard d'un ami, l'amour dans l'attitude de deux amoureux, que l'on observe de loin...

Personne ne peut vivre sans amour, selon moi. "All you need is love"

Tu as raison, l'amour bouscule, prend ses aises, l'amour blesse, parfois. Mais c'est là que réside la dualité de l'existence. Ne faut-il pas être blessé par l'amour pour en savourer pleinement le bonheur, ensuite? Te rendrais tu vraiment compte de ce qu'est l'amour sans jamais avoir connu la haine? De ce qu'est la lumière sans jamais avoir connu l'obscurité? Je ne pense pas...

Tu veux qu'on te parle avec sa raison de ce qu'on pense être l'amour. Et bien, raisonnablement, il n'y a aucune définition possible à l'amour. L'amour ne se définit pas, l'amour ne s'écrit pas, il se vit. T'es-tu déjà retrouvé dans un aéroport, à attendre quelqu'un? C'est alors que tu vois s'élancer une fille dans les bras de l'homme qu'elle aime, et qu'elle n'a pas vu depuis des semaines... Le bonheur et l'amour qui luisent dans ses yeux ne sont pas définissables. La passion avec laquelle elle jette ses bras autour de son cou non plus...

Je ne te dirais pas que tu as raison de rejetter l'amour...

Le bonheur, c'est de pouvoir fermer les yeux, blotti contre celui, contre celle qu'on aime. Le bonheur c'est de voir son regard se refléter dans les yeux de l'autre, c'est d'entendre son "je t'aime" revenir en écho...

Mais ceux qui sont seuls, me diras-tu...

Alors, le bonheur c'est de voir son sourire se transmettre sur le visage de l'inconnu croisé dans la rue, le bonheur c'est de voir un enfant rire aux éclats, même si ce n'est pas le nôtre. Le bonheur, ce sont des centaines de milliers de petites choses qui, mises bout à bout, peuvent faire beaucoup...

Mais le bonheur n'est pas l'absence totale de problèmes, de soucis parce que, comme je l'ai dit plus tôt, on ne peut pas avoir conscience de la beauté du bonheur si l'on a pas, avant, connu le malheur...

Le bonheur ne peut s'opposer au coeur, parce que c'est notre coeur qui nous informe que l'on est heureux, en accélérant ses battements, en battant plus fort, en hurlant sa joie. Sans coeur, comment être heureux?

Mais le bonheur, ce n'est pas seulement l'amour, ça non. Mais ça y est lié, selon moi... Quand on est heureux, tout semble plus beau, rien ne nous agace... Même l'attente devient un moment divin... Parce que pendant qu'on attend un être cher, chez soi, ou sur le quai d'une gare, on passe dans sa tête les images des futures retrouvailles, et ça nous fait sourire. Même l'impatience de l'attente se transforme en moment magique...

Si pour toi, le bonheur, c'est l'état ou rien ne manque, ou rien ne cloche, ou tout est parfait, dis toi bien qu'alors tu ne seras jamais heureux, car la perfection n'existe pas. Et heureusement, car elle deviendrait vite ennuyante. Les petits tracas de tous les jours font eux aussi parti du bonheur. Le bonheur de les réparer, de passer outre, le bonheur de se réconcilier...

L'amour ne peut être concilié avec le bonheur pour la bonne raison que l'amour c'est le bonheur!
Je ne vois pas comment il serait possible d'être heureux sans connaître l'amour... Penses-tu que quelqu'un qui n'a jamais ressenti d'amour, que ce soit vis à vis de ses parents, d'une petite amie, d'un ami, d'un inconnu, etc... puisse être heureux? Je ne pense pas...

Je suis certaine qu'après lecture de mon commentaire, ton opinion sur l'amour n'a pas changé, mais que veux-tu, une éternelle romantique comme moi se devait de réagir à un tel article. Parce que pour moi, l'amour est le moteur de toute chose, la base même de la société actuelle, l'amour est ce qu'il y a de plus beau sur cette terre, même si il contient son lot de souffrances et de tracas, je préfère souffrir et connaître le grand amour, ne serait-ce qu'une seule nuit, que vivre sans souffrances aucunes pendant toute ma vie, mais ne jamais rencontrer l'amour...

Idéaliste? Utopiste? Certainement... et fière de l'être

Abyssia

Répondre à ce commentaire
Le 21/01/04 à 13:16
Chère Abyssia,

Je vais commencer cette réponse par un petit coup de gueule dont, j'en suis certaine, tu ne m'en voudras pas...

Je vais commencer cette réponse à ta réponse par quelques réflexions sur celle-ci. :) Non, je ne t’en voudrai certainement pas pour ton coup de gueule, bien au contraire. Je l’apprécie car il oppose un point de vue qui n’a pas moins de valeur que le mien, et qui mérite que je l’écoute, car il ne peut que m’être utile. Il ne me fera sans doute pas changer mon opinion, mais il me permettra par contre de la préciser, de la corriger là où peut-être elle s’égare. Nous verrons bien.

Première constatation : ton commentaire vient du coeur ; il est « senti » bien plus que « réfléchi ». Il est une révolte. Je ne te blâme certainement pas pour cette révolte face à mes propos qui te semblent inacceptables. J’ai écrit il y a quelques temps un article sur les inégalités du monde, m’indignant de l’état actuel de la répartition des richesses. Cet article, je l’écrivis parce que mon coeur était tout entier révolté face à ce constat, face à nos politiques qui agissent comme s’ils ne voyaient pas que les nations pauvres ont besoin de notre aide. Mon coeur s’élevait face à un sentiment d’injustice qu’il ne peut accepter. Mais c’est un élan qui, s’il prend sa source dans des valeurs que je juge nobles, n’est pas pour autant réaliste. Aussi, il est certaines choses que je dois dire à propos du coeur. C’est un organe utile, parce qu’il est le siège des choses qui sont bonnes en nous, mais c’est un organe qui seul ne peut aller bien loin. Le coeur indique la direction à suivre, il nous montre ce qu’il est bon de poursuivre, ce sont là des choses que l’on sent plus qu’on ne pense. Mon désir de justice n’est pas le résultat d’une réflexion soigneusement menée, il est une chose qui est en moi, quelque chose d’inné. Notre perception de ce qui est bon ou mauvais se situe dans le coeur ; le coeur est entre autres choses l’indicateur du bien et du mal. Mais il présente un travers certain, c’est celui d’être facilement aveuglé par l’émotion. S’il me montre qu’il y a dans ce monde des injustices, il ne me montre nullement comment y remédier. Bien au contraire, parce qu’il me rend l’injustice insupportable, il a tendance à me mettre en rage, et la rage m’aveugle. C’est à l’esprit, à la raison, que revient de prendre des mesures, de réflechir sur les moyens qui mèneront à un monde meilleur. Considère le coeur comme le démarreur d’une voiture, et la raison comme son moteur. Le coeur donne l’impulsion qui va allumer le moteur, mais c’est au moteur qu’incombe la tâche de faire avancer le véhicule. Le démarreur seul ne fait rien avancer, il finirait même par s’étouffer si on forçait trop dessus.

Ainsi, je crois qu’il est nécessaire d’écouter son coeur, car c’est de lui que viennent les belles idées, mais qu’il ne faut pas s’en remettre à lui pour les mener à bien. Quand mon coeur s’indigne des injustices, il voudrait que je me lance corps et âme dans une lutte aveugle contre celles-ci, qui se terminerait fatalement par un échec si je ne fais pas intervenir la raison qui me permettra, elle, de prendre des mesures plus pesées, plus calmes, plus rigoureuses, et surtout plus efficaces. Ainsi, dans mon post sur les inégalités, je touchais bien souvent les limites du raisonnable, prenant ouvertement parti sans appuyer réellement ce que j’avançais. Tu auras remarqué que ma réponse à Ezekiel était déjà plus raisonnée, et avait quitté le domaine de l’indignation, qui seule ne remédie à rien, pour aborder celui de la réflexion, qui elle peut apporter des solutions.

Ta réponse est semblable à mon post sur l’inégalité, je crois : elle est une révolte, utile, mais qui mérite de déboucher sur une réflexion non nécessairement moins « engagée » mais plus appuyée. Je t’invite à relire mon second paragraphe, puis à relire ton commentaire, et à te demander si tu n’as pas réagi de la manière que je décris. :)

Laisse-moi maintenant analyser ta réponse plus en détail. Plutôt que de discuter chacun de tes arguments (opposer ma raison à ton coeur ne mènerait pas le débat bien loin), je vais essayer de te faire mieux saisir mon point de vue, afin que tu voies qu’il n’est pas aussi effroyable qu’il peut paraître. Il ne s’agit nullement de défendre mon opinion face à la tienne, mais de faire avancer le débat, et pour cela, il m’importe d’être compris. Impossible de faire avancer la discussion si nous parlons sans nous écouter, tu en conviendras. Aussi, je vais tâcher de m’expliquer au mieux sur ce que j’ai avancé. Si cela n’était pas encore clair, n’hésite pas à demander d’autres éclaircissements. Mon unique objectif est d’être compris par ceux qui me lisent, non pas de les convaincre que « j’ai raison ».

Je ne comprends pas comment tu peux parler de l'amour avec tellement de froideur... Comme si pour toi, l'amour n'était rien d'autre qu'un mot. Mais sans amour, on mourrait...

Tu ne comprends pas que je puisse parler de l’amour avec froideur. L’amour n’est-il qu’un mot pour moi ? Non, certainement pas. Il est vrai que, puisque je me place dans le domaine de la raison, je le traite comme une donnée mathématique que j’essaie d’analyser de manière aussi objective que possible. L’exercice n’a pas pour but d’être rempli de beaux sentiments ; les sentiments sont le propre du coeur, non pas de la raison. Cela peut sembler odieux ; on n’est pas habitué à sortir l’amour du domaine des sentiments pour le placer dans celui de la réflexion. On vit l’amour bien plus qu’on ne le pense, et il n’est pas rare qu’on en fasse une sorte de religion, en laquelle on croit aveuglément, sans oser en douter. Mais pourquoi ma critique, que j’exerce dans tant d’autres domaines pour en tester la validité, devrait-elle s’arrêter aux frontières du sentimental ? Pour quelle raison devrais-je laisser l’amour en dehors de toute réflexion ?

Tu concevras que l’amour est une des choses les plus importantes dans la vie de l’homme. Par conséquent, je crois que, plus encore que les autres, on se doit de l’analyser avec soin. Lorsque tu décides de souscrire un emprunt auprès d’une banque, tu analyses toutes les clauses du contrat avec prudence. Et pourtant cela n’est qu’une question d’argent. En amour, c’est parfois sa vie que l’on joue. Aussi, combien plus attentivement on se doit d’examiner ce contrat-là !

Je tiens à te « rassurer » immédiatement : l’amour n’est pas pour moi une réalité froide que j’observe de loin, avec désintéressement. Si je prends le temps de le réflechir, c’est bien parce qu’il importe pour moi. Je peux te paraître très immatériel lorsque je raisonne, mais ce n’est pas parce que j’écris avec la tête que je n’ai pas de coeur. De coeur, j’en ai un, un qui bat, et qui bat même un peu trop fort à mon goût. Un coeur qui me fait désirer, qui me fait pleurer, qui me fait rêver de choses tellement douces que c’est au réveil que le cauchemar commence. Un coeur qui appelle à l’amour. Seulement, ce coeur constamment insatisfait me rend la vie difficile. Aussi, je m’interroge sur l’amour, sur sa réalité, celle qu’on ne voit pas parce que le désir d’aimer et d’être aimé nous fait regarder ailleurs.

Si tu as fait un peu le tour de mon blog, tu auras remarqué que j’écris principalement trois types d’articles. Les uns sont des réflexions, les autres de simples récits de ma vie tels qu’on les couche habituellement dans un journal papier, les derniers enfin sont des étâts d’âme. Les premiers je les écris avec la raison, les seconds avec une certaine neutralité, les derniers avec le coeur. Tout ce que j’ai pu écrire sur Ch., sur l’amour, avec le coeur, n’était pas exactement ce que je qualifierais de « froid ». J’ai bien évidemment un coeur, un coeur qui bat, un coeur qui appelle, mais c’est un coeur qui me mène la vie dure et me pousse à me poser cette question qui, pour des raisons que je comprends, te paraît odieuse : l’amour est-il nécessaire ?

Tu t’insurges qu’on puisse en douter, mais je me permets de faire la comparaison avec un fanatique religieux qui s’insurge sitôt qu’on ose douter de l’existence de son Dieu. J’ai longtemps cru en l’amour, j’ai connu une période où je n’ai plus cherché que lui, et j’étais alors exactement comme toi, affirmant que « l’amour c’est le bonheur ».

Ce qui nous oppose, avant tout, est la définition que nous avons de l’amour. Ce que tu appelles l’amour, ce sont les quelques heures que tu passes dans les bras d’un garçon et qui sont effectivement des heures fantastiques, je n’ai jamais prétendu le contraire. Moi, ce que j’appelle amour, ce n’est pas simplement la joie que celui-ci apporte, mais aussi tout le cortège de peine. Définir l’amour comme ce qu’il apporte de bon est en donner une définition totalement incomplète, selon moi. L’amour est beaucoup plus vaste, ses effets sur nous dépassent largement les simples frissons d’un baiser. Prends l’exemple de la télévision. Tu peux définir la télévision comme étant l’objet que l’on connaît. C’est ce qu’on fait naturellement. De la télévision, nous ne voyons que l’objet final, comme s’il avait toujours été là. En réalité, derrière la télévision se cache un projet qui a demandé à des dizaines de scientifiques des milliers d’heures de travail, ce furent mille échecs avant d’arriver au résultat espéré, ce furent des nuits blanches, des découragements. L’amour est semblable à cela. Dire que l’amour c’est uniquement les bons moments que l’on a connus, c’est prétendre qu’un iceberg se limite à sa partie emergée, qui est de loin la plus mince. L’amour, ce ne sont pas quelques bons souvenirs, quelques baisers échangés sur un banc au bord de la Seine. C’est aussi tout ce que cela nous a demandé auparavant, ce sont les nuits passées à pleurer pour des filles (ou des garçons dans ton cas) que notre amour laissait indifférent, c’est cette sensation de manque pendant des années. C’est aussi ce qui fait que l’on est ému au cinéma quand Roméo rate Juliette, c’est ce qui fait qu’on s’ennuie le week-end. Ce n’est pas juste un baiser échangé avec une belle demoiselle (ou un beau damoiseau) au coin d’un champ.

Si tu acceptes cette définition « large » de l’amour en tant que sentiment global avec tous les effets sur notre personne qui y sont liés, tu conviendras qu’il n’est plus aussi évident que l’amour soit une chose formidable. Embrasser une fille est une chose formidable, c’est indéniable, mais embrasser une fille n’est qu’une partie de l’amour. Ou si tu veux, on pourrait aussi donner une définition large du baiser, qui commencerait parfois plusieurs mois avant l’acte, lorsqu’on tombe amoureux, qu’on souffre de n’oser déclarer sa flamme, qu’on meurt de voir l’être aimé courtisé par d’autres. Cela continuerait avec l’acte, puis le manque que celui-ci entraîne ensuite, car il n’est pas facile d’attendre parfois de longs mois avant le suivant. Cela enfin, durerait parfois des années après la rupture, lorsque le souvenir de ce baiser nous hante encore. Dés lors se pose la question : le baiser (l’acte) vaut-il vraiment les heures, les moins, les années de trouble qui lui sont indissociables ?

Je me doute que peu de gens feront preuve d’assez de bonne foi pour accepter de définir l’amour autrement que comme les quelques instants merveilleux qu’il apporte. Je n’appellerais pas cela de l’hypocrisie, mais une sorte de fanatisme. L’hypocrite est conscient de sa mauvaise foi, tandis la foi du fanatique est réelle, mais erronnée. Les fanatiques qui défendent leur religion jusqu’à la mort sont aveuglés par leur cause, ils ne font plus qu’une avec elle, ils s’y sont tellement identifiés que la remettre en cause, c’est remettre leur existence entière en cause, avec le risque de la voir s’écrouler au bout du compte. Et alors, que deviendrait le fanatique religieux ? Puisque la religion est sa vie, la mort de la religion est sa propre mort, aussi défendra-t-il celle-ci envers et contre tout, parce que c’est lui-même qu’il défend.

Tu m’en voudras sans doute de te comparer à une sorte de « fanatique de l’amour », qui s’accroche à cette religion comme si c’était toute sa vie. Ne dis-tu pas toi-même : « sans amour, on mourrait » ? Il n’y a rien de mal à croire aveuglément en l’amour, bien évidemment, et quand je parle de fanatisme, c’est un peu exagéré. Il n’y a aucun danger à croire en l’amour, mais je voudrais que tu réalises que tu parles de l’amour comme d’un Dieu, une sorte de chose toute puissante que tu défends avec rage. C’est noble de ta part, car cela part d’une bonne intention, mais je t’invite quand même à réfléchir sur la question.

Je continue à commenter ta réponse.

As-tu déjà imaginé ta vie sans la moindre étincelle d'amour? Pourrais-tu vivre sans aimer? Et je ne te parles pas forcément ici de l'amour partagé avec une femme, mais de l'amour, dans sa forme générale. L'amour d'une mère pour son enfant, l'amour qu'on peut lire dans le sourire d'un inconne, au coin d'une rue, l'amour dans le regard d'un ami, l'amour dans l'attitude de deux amoureux, que l'on observe de loin...

L’amour dont je parle est celui qu’un homme porte à une femme, et nul autre. Je ne pourrais que difficilement vivre sans mes plus proches amis. Le fait de voir une mère pouponner son bébé, deux amoureux s’embrasser, ne me cause pas ce que j’appellerais de l’amour, mais disons un bonheur communicatif, le sentiment d’appartenir à une espèce, un monde, agréable. Je suis heureux de les voir heureux, exactement de la même manière que je suis heureux de voir les gamins jouer avec des bateaux au Luxembourg, ou d’entendre un oiseau chanter dans un parc en plein hiver. Mais cela est un sentiment différent de l’amour, selon moi. Quand au sourire d’une inconnue au coin d’une rue... C’est devenue chose rare, et d’autant plus appréciée ! Il semble que désormais, pour montrer à quelqu’un qu’il ne nous laisse pas indifférent, le code soit d’afficher l’indifférence la plus complète, avec une touche de mépris si on est vraiment intéressé. Maintenant, pour moi, cela non plus n’est pas de l’amour. Une sorte de complicité, la joie de croiser un(e) compatriote en pays étranger, plutôt.

Personne ne peut vivre sans amour, selon moi. "All you need is love"

Certains peuvent vivre sans l’amour d’une femme, selon moi. Savoir si j’en fais partie est une autre question... Ma raison dit « oui, cela est plus sage », mon coeur dit « non, cela est impossible ». Qui dois-je écouter ? Je ne dis pas qu’un homme peut vivre sans femme, mais seulement sans relation amoureuse ; tout homme a besoin d’elles, pour des raisons qui dépassent le cadre de l’amour, cela est certain. Mais l’amitié ne peut-elle seule apporter ce dont on a besoin ?

Tu as raison, l'amour bouscule, prend ses aises, l'amour blesse, parfois. Mais c'est là que réside la dualité de l'existence. Ne faut-il pas être blessé par l'amour pour en savourer pleinement le bonheur, ensuite? Te rendrais tu vraiment compte de ce qu'est l'amour sans jamais avoir connu la haine? De ce qu'est la lumière sans jamais avoir connu l'obscurité? Je ne pense pas...

La lumière est le contraire de l’obscurité. Sitôt qu’on quitte l’une, on entre dans l’autre. Par conséquent, on peut définir l’une par rapport à l’autre. Pour le reste, je me méfie un peu de la « dualité ». Crois-tu qu’une jeune fille qui n’a jamais souffert d’amour (mettons que le premier garçon dont elle tombe amoureux ait les mêmes sentiments pour elle, et qu’ils se l’avouent immédiatement) n’appréciera pas son premier baiser à sa juste valeur ? Faut-il avoir souffert pour être capable d’apprécier l’amour ? Le nouveau né sourit-il dans les bras de sa mère parce qu’il a souffert loin d’elle ? Et l’amitié, faut-il avoir souffert en amitié pour être capable d’apprécier l’amour pour un ami ? Pour ma part, je ne crois pas avoir jamais haï personne, à une exception près. Cela ne m’a jamais empêché d’aimer, pleinement, follement même. Et d’apprécier la chose comme se doit.

Tu veux qu'on te parle avec sa raison de ce qu'on pense être l'amour. Et bien, raisonnablement, il n'y a aucune définition possible à l'amour. L'amour ne se définit pas, l'amour ne s'écrit pas, il se vit.

Les points suivants s’expliquent par notre différence de définition de l’amour. J’y réponds tout de même, parce qu’ils soulèvent des questions intéressantes.

L’amour ne se définit pas.
Je pense que l’amour se définit. Le fait qu’on utilise le mot « amour », et qu’on soit capable d’en parler entre nous, prouve qu’il existe derrière ce mot une idée qui peut-être varie légèrement d’un individu à l’autre, mais présente suffisamment de contenu commun pour que les conversations sur l’amour ne soient pas des dialogues de sourds. Tu me répondras peut-être que l’amour est infini, et qu’aucune définition ne saurait l’englober. Si c’était le cas, on ne pourrait pas non plus définir le mot « infini », hors on le peut. :) On peut définir, je crois, tout ce que l’esprit comprend. Définir une chose est d’ailleurs un exercice tout à fait intéressant, car il permet de voir si l’on sait ou non de quoi l’on parle. En maths, on apprend que l’essentiel de la difficulté d’un problème réside dans sa définition. Une fois le problème bien défini, la solution en découle d’elle-même. Je crois que c’est une chose qui reste vraie dans d’autres domaines, notamment dans celui de la réflexion. Avant de se lancer dans une réflexion, il importe de définir soigneusement chacun des termes que l’on utilise, d’une part pour éviter les confusions, d’autre part parce que cela donne très souvent le point de départ de la discussion. Je pense que l’amour peut tout à fait être défini. D’ailleurs, puisque nous n’avions pas la même définition, il convenait de le faire, tu ne crois pas ?

L’amour ne s’écrit pas.
Je me permets de te taquiner : que fais-tu des lettres d’amour ? Ne sont-elles pas un élément important d’une relation amoureuse ? Et des romans qui mettent en scène l’amour ? N’aimons-nous pas en même temps que le héros ou l’héroïne ?

L’amour se vit
Rien à ajouter. Dans ta définition, effectivement, il se vit ; dans la mienne, il se pense aussi. Je suis toutefois d’accord avec toi pour dire que la composante qui fait ta définition, c’est-à-dire l’amour « présent », celui qui débute avec la déclaration et se termine avec la rupture (rappelle-toi que le mien commence avant et se termine bien après), se vit et ne se pense que très peu. J’ai toujours eu des relations complètement passionnelles, incapable de me raisonner (ce qui est le comble pour un type qui vient raconter que l’amour est inutile, tu me le concèderas ! — Mais cela y est lié, cela dit.). C’est après la rupture, lorsqu’on refait le chemin seul, qu’on peut réfléchir sur ces choses que l’on a vécues sans y penser.

T'es-tu déjà retrouvé dans un aéroport, à attendre quelqu'un? C'est alors que tu vois s'élancer une fille dans les bras de l'homme qu'elle aime, et qu'elle n'a pas vu depuis des semaines... Le bonheur et l'amour qui luisent dans ses yeux ne sont pas définissables. La passion avec laquelle elle jette ses bras autour de son cou non plus...

J’ai été l’homme dans les bras duquel une fille venait se jeter, je l’ai été même un sacré paquet de fois, en fait. C’est une chose unique, merveilleuse, inexprimable (enfin indéfinissable si tu préfères, là dessus je ne peux pas te chercher queurelle). C’est le sentiment d’être de retour chez soi après avoir erré des mois entiers loin de tout. Je ne te contredirai certainement pas là dessus.

Je ne te dirais pas que tu as raison de rejetter l'amour...
Le bonheur, c'est de pouvoir fermer les yeux, blotti contre celui, contre celle qu'on aime. Le bonheur c'est de voir son regard se refléter dans les yeux de l'autre, c'est d'entendre son "je t'aime" revenir en écho...


Se blottir contre quelqu’un qu’on aime est une forme de bonheur, je ne le nie pas. Mais ce n’est pas le seul bonheur. C’est une chose qui en fait partie, mais qui, ne pouvant être dissociée d’autres choses moins heureuses, doit être considérée et pesée dans son ensemble. C’est le tout qui m’intéresse, non juste la partie agréable.

Mais ceux qui sont seuls, me diras-tu...
Alors, le bonheur c'est de voir son sourire se transmettre sur le visage de l'inconnu croisé dans la rue, le bonheur c'est de voir un enfant rire aux éclats, même si ce n'est pas le nôtre. Le bonheur, ce sont des centaines de milliers de petites choses qui, mises bout à bout, peuvent faire beaucoup...


Entièrement d’accord avec toi.

Mais le bonheur n'est pas l'absence totale de problèmes, de soucis parce que, comme je l'ai dit plus tôt, on ne peut pas avoir conscience de la beauté du bonheur si l'on a pas, avant, connu le malheur...

Entièrement pas d’accord avec toi. :) Nos avis sur la « dualité de l’existence » s’opposent. Cette façon de prétendre que le bonheur ne serait rien sans le malheur ressemble à mes yeux à une tentative de justifier le malheur, de lui donner un sens, bien plus qu’au résultat d’une observation rigoureuse. En le faisant le contrepoids inévitable du bonheur, on justifie le malheur, on le positivise, même. C’est grâce à lui que le bonheur est si beau. Mais ce n’est pas là ma façon de penser. Je peux tout à fait concevoir le bonheur indépendamment du malheur. Je pourrais tout à fait aimer une femme de toute la force de mon coeur sans avoir besoin de souffrir d’amour à côté. Je ne considère pas que l’absence de bonheur soit l’égale de la présence du malheur. Les deux sont incompatibles, mais ce n’est pas parce qu’on quitte l’un qu’on entre forcément dans l’autre. Je conçois tout à fait un terrain neutre entre les deux. Cette façon de penser peut déranger : comment dés lors justifier le malheur, comment le supporter puisqu’il n’est plus un passage nécessaire au bonheur ?

Le bonheur ne peut s'opposer au coeur, parce que c'est notre coeur qui nous informe que l'on est heureux, en accélérant ses battements, en battant plus fort, en hurlant sa joie. Sans coeur, comment être heureux?

Je crois simplement que tu appelles bonheur ce que j’appelle passion ou joie. Tu assimiles le bonheur à l’état que tu connais dans les bras d’un homme, je l’assimile pour ma part à un état que je connais seul. Maintenant, peut-être fonctionnons-nous différemment. Tu vis peut-être tes relations amoureuse avec calme et assurance, tandis que je vis les miennes avec passion et emportement. Cela n’a rien d’impossible, après tout.

Mais le bonheur, ce n'est pas seulement l'amour, ça non. Mais ça y est lié, selon moi... Quand on est heureux, tout semble plus beau, rien ne nous agace... Même l'attente devient un moment divin... Parce que pendant qu'on attend un être cher, chez soi, ou sur le quai d'une gare, on passe dans sa tête les images des futures retrouvailles, et ça nous fait sourire. Même l'impatience de l'attente se transforme en moment magique...

OK. Rien à ajouter. Nous divergeons simplement sur la définition. L’amour selon ta définition rend heureux. Selon la mienne, il rend heureux ET malheureux. Cela rejoint mes commentaires précédents. L’attente, pour moi, est magique pendant les 24 heures qui précèdent les retrouvailles. Les mois qui précèdent, l’attente est plutôt un enfer !

Si pour toi, le bonheur, c'est l'état ou rien ne manque, ou rien ne cloche, ou tout est parfait, dis toi bien qu'alors tu ne seras jamais heureux, car la perfection n'existe pas. Et heureusement, car elle deviendrait vite ennuyante. Les petits tracas de tous les jours font eux aussi parti du bonheur. Le bonheur de les réparer, de passer outre, le bonheur de se réconcilier...
L'amour ne peut être concilié avec le bonheur pour la bonne raison que l'amour c'est le bonheur!


Le bonheur, pour moi, est le fait de savourer l’instant présent, sans tendre vers quoi que ce soit d’autre. Ce n’est nullement la perfection, mais l’absence de tout désir insatisfait qui me ferait tendre vers quelque chose d’inaccessible pour le moment. Le bonheur n’est pas incompatible avec un robinet qui fuit, au contraire même, j’étais heureux avant d’essayer de le réparer et de remplir mon appart de flotte. :)

Assis dans l’herbe à côté de la fille que j’aime, je suis heureux parce que je ne désire rien que je n’aie à ma portée. D’une certaine manière, l’amour faciliterait le bonheur, puisqu’il focalise tout le désir sur un seul et unique objet, qui une fois atteint supprime donc l’intégralité de notre désir. Point de vue tout à fait intéressant, et qui malmène sacrément ma théorie, d’ailleurs. Du moins, pas tant que ça, en fait, puisque ma définition englobe l’amour dans son entier, et qu’alors je peux retourner l’argument en disant : l’amour ne se content pas de focaliser les désirs existants, il les décuple, par conséquent, lorsque l’objet de désir devient inaccessible, temporairement ou définitivement, je me retrouve avec des désirs insatisfaits cent fois plus violents que ceux que j’avais avant, ce qui cette fois massacre le bonheur à coup de rateau (je sais qu’on ne massacre pas au rateau, mais avec un autre outil, je tombais une ambiguïté non souhaitée...).

Je ne vois pas comment il serait possible d'être heureux sans connaître l'amour... Penses-tu que quelqu'un qui n'a jamais ressenti d'amour, que ce soit vis à vis de ses parents, d'une petite amie, d'un ami, d'un inconnu, etc... puisse être heureux? Je ne pense pas...

Par « connaître l’amour », entends-tu « savoir ce qu’est l’amour » ou « vivre l’amour » ? Je ne pense pas qu’un homme qui n’ait jamais ressenti d’amour puisse être heureux, ne serait-ce que parce qu’il y a de fortes chances qu’il courre encore après, ne l’ayant pas connu. :) Je pense par contre qu’un homme qui aurait connu l’amour, pleinement, longtemps, pourrait ensuite s’en désintéresser durablement. L’ayant connu, l’ayant vécu, tout ce qu’il pourrait retrouver serait au mieux un amour équivalent. Mais il pourrait aussi s’en détourner, préférant s’intéresser à d’autres choses de la vie.

Maintenant, est-il si aisé que cela de vivre seul ? Je ne sais pas. La vraie solitude rendrait rapidement fou. J’ai passé, une fois, une ou deux semaines dans ma chambre d’étudiant, tandis que tous les potes étaient rentrés, dans un coin où il n’y avait guère à faire, et où je ne connaissais plus personne. J’ai eu du mal à garder le moral, je dois l’avouer. Mais il y a tout de même un juste milieu entre vivre marié et vivre dans la solitude la plus complète. Si tant est qu’on voit du monde dans la semaine au boulot, qu’on a quelques potes avec qui occuper les week-ends, ou diverses activités qui permettent d’allier le social à l’agréable, ma foi, je pense qu’on peut survivre au petit déjeuner en tête à tête avec le grille-pain.

Je suis certaine qu'après lecture de mon commentaire, ton opinion sur l'amour n'a pas changé, mais que veux-tu, une éternelle romantique comme moi se devait de réagir à un tel article. Parce que pour moi, l'amour est le moteur de toute chose, la base même de la société actuelle, l'amour est ce qu'il y a de plus beau sur cette terre, même si il contient son lot de souffrances et de tracas, je préfère souffrir et connaître le grand amour, ne serait-ce qu'une seule nuit, que vivre sans souffrances aucunes pendant toute ma vie, mais ne jamais rencontrer l'amour...

Je ne peux que te remercier pour ton intervention, qui a permis de soulever certains points majeurs, notamment la définition de l’amour, que je n’aurais pas dû considérer implicite. Et je comprends tout à fait ton point de vue. J’ai longtemps été un fervent défenseur de l’amour, qui me semblait être la seule raison de vivre de l’homme. Aujourd’hui, je pèse le pour et le contre, j’essaie de perdre ma vision naïve et idéalisée de l’amour, au profit d’une vision plus stable, qui peut-être me permettra aussi d’aimer mieux. Actuellement, c’est vrai, je rejette l’amour, qui est un désir qui me ferait tendre à la fois vers l’avenir et vers le passé, au point de m’en retrouver écartelé et incapable de profiter du présent. Je préfère laisser tomber l’amour, dont j’ai aujourd’hui une vision désagréable, entre autre parce que mes sentiments sont trop violents pour être appréciés sereinement. Aimer, pour moi, c’est être déchiré avant, pendant, et après la relation. De tels sentiments, je préfère les faire taire. Maintenant, tu sais, si l’amour se présente, je connais mon coeur. Il aura tôt fait de faire taire ma raison, et je serai reparti comme en 14. :)

Encore merci pour tes commentaires. En espérant que tu n’aies pas trouvé les miens trop longs ou pénibles, voire blessants. Je précise cela parce qu’il m’est arrivé d’avoir des tournures qui, dans mon référentiel, étaient neutres, mais dans le référentiel de mon interlocuteur, prenaient un sens différent et blessant. Si c’est le cas, c’est malgré moi, et je m’en excuse. J’ai apprécié ton commentaire et ai pris plaisir à y répondre ; n’hésite pas à pousser un autre coup de gueule si ton coeur se révolte à la lecture des horreurs que je viens d’ajouter ! ;)

Bien à toi,

Barjac
Répondre à ce commentaire
Le 17/02/04 à 21:55

Cher BarJac...

Je vais faire ici un commentaire très bref qui j'espère ne paraitra pas "réducteur" du long et très juste article que tu as pondu...

Je suis toujours aussi fasciné de voir combien mes mots se fondent ici avec les tiens... je n'en reviens toujours pas de cette impression de déjà vu, lorsque je te lis, j'ai une impression très forte de me lire...

Pour faire court (je suis crevé et pas bien dans ma peau) je dirais que je suis à 100% d'accord avec toi, il n'est pas un mot qui me place en désaccord. Cependant j'apporterais un bémol: Tu définis le bonheur comme le niveau zéro d'une échelle à double sens et j'en ai la même définition. Cependant le bonheur n'est pas le but ultime de ma vie... je sais cela n'a rien de raisonnable, mais je ne peux m'empêcher de penser que lorsque notre heure approchera, les images qui réchaufferont mon corps seront celle qu'ont imprimées ma passion... Tu le dis fort justement, la passion est désordre. Et comme j'adore ta métaphore du Soda et de l'eau, permet moi une image de mon cru: ma passion, c'est mon héroïne... celle qui me place dans un état second, déconnecté du mal, dont les sensations sont intenses comme rien d'autre ne peut l'être... et après comme chacun le sait, il y a la redescente... elle est douloureuse, elle crée le manque, la douleur et toute une liste noire que je ne dresserais pas, convaincu que tu sais de quoi je parle. "L'héroïne" me tuera (c'est toujours une métaphore :-) ) mais je ne peux pas vivre sans en prendre à chaque fois que je peux... je m'explique:

Je suis d'accord avec toi, quelle bonheur d'observer des toits ensoleillés, des gamins qui jouent, un chat qui dort sur un canapé... Mais n'est-ce pas quelquepart un concept "d'ignorance" comme on ignore le manque, le doute, la douleur que provoque souvent l'amour...? ces toits qui brillent abritent surement des gens qui se disputent ou changent de chaine lorsqu'ils voient un somalien plein de mouche en train de pleurer pour survivre...? ces enfants qui jouent ne feront ils pas une petite bagarre improvisée pour savoir qui est le chef de la bande...? ce chat qui dort n'attends il pas de toi que tu lui donne sa paté et que tu lui foute la paix...?   Ce que je veux dire c'est qu'en chaque plaisir il y a aussi le noir... j'en suis convaincu... le problème concernant l'amour est que c'est flagrant. Mais autant je ne pourrais me priver de regarder dormir mon chat égoïste en le regardant comme une peluche affectueuse, autant je ne veux pas me priver de l'amour assassin est chaotique en l'imaginant intense et beau...

Pour conclure tout ça, je vois l'homme comme un être masochiste. Je ne pense pas qu'il se fasse mal pour avoir mal... quoiqu'il fasse, et aussi irraisonnable que ce soit, il le fait en cherchant le plaisir. Et c'est pour moi le but ultime de ma vie: le plaisir... C'est ce qui fait que l'amour m'est indispensable malgré le lourd salaire qu'il demande... C'est ce qui fait probablement que l'amour est indispensable à presque tout le monde, y compris les petits ados de 12ans qui n'ont pas les mots et la reflexion pour le dire...

J'espère que tu auras compris que je suis convaincu par ta définition du bonheur, et tout aussi convaincu par ta définition de l'amour... je voulais juste dire que je ne cherche pas le bonheur. Il est délicieux, mais ma vie a besoin de plus pour exister...

Ezekiel.

Répondre à ce commentaire
Le 19/02/04 à 11:43
Mon cher Ezekiel,

Je te remercie pour ce commentaire qui, par le point de vue différent du mien qu'il propose permet de faire avancer la réflexion. J'y ai répondu dans un nouvel article (sans quoi cette page aurait fini par faire 200 ko) : Nouvelles réflexions sur l'amour.

Je note au passage ton "mal dans ma peau". Je ne pense pas être le mieux placé pour t'écouter, mais si jamais tu éprouves le besoin de te confier, n'hésite pas, je ferai de mon mieux pour prêter une oreille attentive :)

Bien à toi, et bonne lecture,

Barjac
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